La saga des troya - Saison 5 - Chapitre 19
Les armées, les commerces, les carrières, mais toujours la terre.
Mais revenons dans ce cadre, aux Détroyat de Murinais : le fils d’Antoine.
Le comte Timoléon d’Aberjon de Murinais, rencontre le père de Joseph et conseille pour son fils de le faire entrer à l’armée. La révolution se conforte, l’idée de la Nation est établie. Le comte demande à Joseph de bien vouloir remplacer son fils qui est désigné pour rejoindre l’armée. Il sait qu’il y a bien longtemps les deux familles se sont unies, que cette demande peut être fondée pour deux raisons, celle du sang, mais surtout pour redonner à ce fils Joseph une espérance de vie nobiliaire.
Poussé par le comte devenu Maire, il s’engage le 17 mars 1793 au bataillon de Lot, comme voltigeur.
Rejoint Lyon, entre en « rapports » avec Bonaparte en faisant le siège de Toulon. Le calendrier devient républicain.
Il part à pied depuis Toulon, va faire la campagne des Alpes, où il fait réellement connaissance avec le feu.
Toujours à pied, il passe en Italie et participe à la bataille d’Arcole et de son fameux pont.
Bonaparte pauvre en artillerie, promet « honneur, gloire et richesses » à tous les hommes présents, mais surtout aux voltigeurs sur lesquels Augereau et Masséna comptent pour une guerre de mouvements très rapide. L’affaire rondement menée, ils entrent à Milan en 1796.
Joseph, un peu plus aguerri, est quand même blessé du bout du sabre sur l’avant bras, au moment où il enlève avec ses camarades, la dernière place des Autrichiens vers l’église du village, remarqué par Augereau il est promu de suite au grade de sergent. Napoléon ayant besoin d’hommes déterminés accepte et signe la nomination.
Mais il reste Mantoue barrant toujours la route des Alpes.
Sa blessure lui vaut une permission, lui permettant de venir à Murinais, chez son père et sa mère. Il va raconter au village le détail de cette traversée du Pont d’Arcole. Devenant presque un héros, lui, qui trois ans plus tôt, était considéré comme le sans souci du village. Trois ans qu’il a mis à se perfectionner en écriture, moins en lecture car il savait bien lire.
Cette remarque est faite en tenant compte des premières pièces militaires, qu’il va signer d’une simple croix. Même son brevet de la légion d’honneur sera signé de la même façon. Il prenait mieux la peine de guerroyer, que de faire l’effort de signer son nom ce qu’il savait pourtant faire. En fin de compte n’est-ce pas lui qui a eu raison : il valait mieux rentrer vivant que de mourir en homme de lettres, Napoléon disait toujours qu’un mort ne pouvait plus servir. (De service).
Rappelé à son régiment en 1798, il part pour la campagne d’Egypte, pendant l’an 6-7-8 et 9, quatre ans de tribulations avec Desaix et Bonaparte nommé au retour consul à vie.
Joseph écrira à son père à Murinais :
« J’ai eu la chance de me battre pour un homme, ne pouvant laisser indifférent, c’est le début pour moi d’une nouvelle vie. Mais cette fois, la cavalerie a écopé les dégâts. Par contre, nous avons dû marcher des mois entiers sans arrêt et toujours plus vite. Heureusement pour moi, mon grade m’attribue un cheval. Le pays que j’ai vu, je ne le reverrais certainement jamais ». Extrait de la lettre qu’il adresse à son père alors qu’il est encore en Afrique du Nord.
En 1804, il rejoint avec les voltigeurs, Boulogne. Bonaparte est Empereur depuis le 2 décembre 1804. Son armée est stationnée là, Napoléon envisage la conquête de l’Angleterre. Mais les Autrichiens et les Russes préparent une invasion par la Tchécoslovaquie. L’armée lève le camp passe par le sud de Paris où un camp provisoire est installé à Vanves.
Paris n’est pas loin, Joseph et deux amis partent faire une tournée des auberges et des filles. L’uniforme aide bien dans ces cas là.
Au lieu de rencontrer des filles à soldats, il fait connaissance d’une jeune fille par le hasard d’une promenade vers le centre de Paris, qu’en fin de compte il ne rejoindra pas.
Il rencontre Marie Gaverrant, que l’uniforme de sous-officier voltigeur, fait autant la conquête que Joseph lui-même. C’est vrai qu’avec leur grand shako à plumet vert et jaune, la plaque du régiment au dessus de la visière, les épaulettes vertes, la vareuse bleu foncé et revers rouge, col haut jaune, parements blanc, gilet à brandebourgs dorés, les galons en volutes sur les manches, culotte blanche, lui donnent très belle allure. (Certains moqueurs, diront les voir comme des perroquets aras).
Marie craque et tombe amoureuse de Joseph, qui a fait des progrès sur bien des plans surtout sur celui des responsabilités de l’engagement personnel et de l’écriture qu’il perfectionne avec l’aide d’un ami, l’aidant à rédiger ses lettres, mais qui comme lui a résisté à tous les champs de batailles.
Ils vont se voir, avec Marie, tous les jours pendant la halte de son régiment.
Elle l’emmène chez elle, 2 rue Copeau à Paris ; son père est veuf, sa mère est décédée en la mettant au monde, il y a maintenant 28 ans. Son père est resté seul pour élever sa fille, en gagnant bien sa vie, avec un atelier d’ébénisterie occupant quatre compagnons dont deux faisant leur tour de France. Aujourd’hui elle s’occupe de lui, puisqu’il est seul.
Joseph a 33 ans, il plaît au père qui accepte de le recevoir comme prétendant. Il laisse à Marie son trésor de guerre, ramené comme il a pu sous plusieurs formes, argent, bijoux, des choses peu encombrantes, mais souvent de valeur.
Cette pratique pas très orthodoxe, de se servir quand on trouve, est pratiquée par tous y compris les généraux, c’est le « jeu » à la contrepartie de sa vie, du moins à cette époque.
Ils lèvent le camp en direction de la Tchécoslovaquie. Napoléon veut rencontrer les Autrichiens et les Russes, comme à son habitude, là où il veut.
Son choix : la plaine du devant d’Austerlitz au sud de Brünn.
Son armée va marcher sans arrêt, tambours battant, surprenant tout le monde par la rapidité de son déplacement.
Pendant la bataille, Joseph est blessé pour la seconde fois, une balle lui traverse le biceps du bras gauche. Il perd beaucoup de sang, mais tient bon. Son ami de toujours va lui sauver la vie en lui bandant le bras très serré, avec un morceau de la chemise d’un cavalier Autrichien tué peu avant.
Après la bataille, qu’il finira avec son régiment, il va écrire souvent à Marie, lui disant ce qu’il ressent devant tant de morts, mais aussi ce qu’il pense du chef, commandant avec autant de stratégie, à plus de cinq cents mille hommes.
Le temps de se remettre de sa blessure au cantonnement, c’est de nouveau la Prusse qui menace.
Joseph, dont la blessure au bras n’empêche pas de suivre son régiment, va, d’Austerlitz, rejoindre Iéna en 1806. Napoléon place son armée entre Berlin et l’armée Prussienne. Il établit ses troupes sur le plateau d’Iéna. Il fait amener tous ses canons, par des chemins impraticables, que les soldats arrivent à rendre carrossable au passage de l’artillerie en une seule nuit. Joseph a pris part aux travaux avec toute l’armée, au commandement de ses hommes.
Le lendemain, pour la bataille, Joseph se trouve en encadrement d’un carré de la division Morand. Dix mille cavaliers adverses se précipitent sur les carrés.
Le carré où se trouve Joseph est formé de soldats très aguerris, lesquels au lieu de tirer, mettent leurs shakos au bout de leur fusil, en criant vive l’Empereur.
· Mais tirez donc, crie le colonel !
· Nous avons le temps nous tirerons à quinze pas répond Joseph.
Presque à bout portant, un feu terrible décime la cavalerie prussienne, renouvelant en vain ses charges furieuses ; chaque fois décimée par des carrés imperturbables, où s’amoncelle au devant d’eux, une barrière d’hommes et de chevaux morts.
En 1809 Joseph traverse encore la moitié de l’Europe, entre le 13 et le 17 avril il rejoint le Danube. Participe encore à la furie d’Eckmühl le 22 avril, devenue un presque corps à corps. Le 12 mai 1809 il est de nouveau à Vienne. La même année, il est à Wagram le 11 juillet, où il est blessé pour la troisième fois. Il est nommé lieutenant. ( Cette nomination n’est pas certaine).
Heureusement pour lui c’est l’armistice demandé par l’Empereur d’Autriche, lui permettant d’être bien soigné.
Pendant trois ans Joseph va connaître une paix relative. Toujours autant amoureux de Marie, il l’épouse en juin 1810, se fixant chez Marie Gaverrant devenue sa femme, en même temps qu’il reste à l’armée comme officier des voltigeurs.
Il va rester avec sa femme et son régiment, encore deux ans jusqu’en 1812.
Joseph est heureux, car il trouve auprès de Marie, le calme, la joie simple d’un couple s’aimant, sans se poser de question, profitant de la solde et des prises de guerres, pour mener une vie sans souci. Sachant très bien son métier le plus dangereux qui soit pendant cette période. Sur les champs de batailles des millions d’hommes de tous camps sont tombés. Alors … quand il se retourne … il se demande comment il a fait pour être encore ici.
Ce genre de réflexions doit sans aucun doute vous tremper un caractère et vous faire comprendre, qu’il faut profiter du moment, ce qu’il fait sans retenue.
L’Angleterre est à genoux par la puissance du blocus continental, en plus elle est à la veille d’une lutte avec les Etats-Unis, amis de la France.
Nous savons pourquoi. Mais les Anglais vont tout faire pour que Napoléon se déchire avec Alexandre de Russie, n’étant lui-même, peut-être pas si ingénu que cela.
Le résultat sera obtenu, c’est la campagne de Russie en 1812. Joseph est nommé comme capitaine aux voltigeurs du 9 ième de ligne, regroupant tous les anciens les plus expérimentés de toute la région Parisienne. Car depuis 1810 il est Parisien à l’adresse du 2 rue Copeau où il habite avec Marie.
Le voilà reparti pour la Russie, après la réunion de Dresde, que Napoléon espère suffisamment intimidante pour calmer Alexandre. Rien n’y fait.
Le 24 juin Joseph franchit le Niémen à Kowno. Traverse la Lituanie le 28 juin sans livrer bataille. Toute la grande armée est stupéfaite de tant d’art militaire. Napoléon veut rencontrer les Russes là où il le veut : il a choisi Witepsk.
La bataille s’engage dans la plaine, le 9 ième de ligne est en mouvement pour rejoindre un point stratégique, les russes le voient, la cavalerie russe enveloppe 300 hommes et leurs officiers dont Joseph.
Napoléon les croit perdus et envoie un renfort de dégagement. Mais les Russes ne savent pas à qui ils ont à faire, des hommes ayant tout vu, connaissant tout de la guerre.
Au lieu de prendre peur et de chercher à fuir, les 300 hommes se pelotonnent et par des décharges répétées à bout portant, comme fait le jour d’Iéna, arrêtent la nuée fondant sur eux. La cavalerie ayant lourdement payée, elle se retire ; mais les voltigeurs leur donnent la chasse, continuant la lutte, mettant en pratique le roulement des rangs prêt au tir, commandés pour ces manœuvres en grande partie par Joseph.
Napoléon les rejoint à cheval.
· « Qui êtes vous mes amis ? ».
· Voltigeurs du 9 ième de ligne Sire, tous enfants de Paris … Lui répond Joseph.
· « Bravo leur dit-il, vous avez tous mérités la Croix. »
Joseph s’est encore tiré d’une mauvaise position et glane au passage la Légion d’honneur permettant de diriger l’avenir de sa descendance, grâce aux aides qu’elle va lui procurer.
Jusqu’au 7 septembre les Russes subissent des pertes, se retirant sans cesse.
Le 14, Joseph est à Moscou. Il vient de faire en plus de la guerre trois mille kilomètres, comme tous ses amis.
La stratégie de la « terre brûlée » des Russes, fait son effet. L’intendance ne suit plus, figée sur place. Ils vont manger leurs chevaux pour survivre. De nombreux vont mourir de froid. Nous connaissons la suite, se fut la Bérézina, dit à tort comme une pagaille, alors que la préparation était géniale, sauvant une très grande partie de l’armée.
Joseph passe encore les ponts provisoires, refait encore, les trois mille kilomètres dans l’autre sens pour rejoindre la France, autant à pied qu’à cheval, de plus en plus à pied, les chevaux servant de nourriture il n’en reste bientôt plus.
En 1813, au camp de Boulogne, il reçoit des mains de l’Empereur cette Croix tant méritée, et bien sûr, la pension de deux cents francs or, qui va avec. C’est le premier de la famille Détroyat à recevoir la Légion d’honneur, mais ce ne sera pas le dernier, tant s’en faut, puisqu’il y en aura onze autres.
La même année il repart pour la Saxe, en 1814, deux armées ennemies entrent en France, Joseph en fait la bataille. Napoléon n’a plus qu’une poignée de soldats aguerris, mais par sa stratégie digne d’un génie militaire, il va résister trois mois et tenir tête aux trois cent soixante mille hommes de la coalition.
Paris capitule le 31 mars 1814. Le coup fut terrible pour le moral des troupes. Il doit se rendre à son tour.
Joseph est toujours là malgré une autre blessure un peu plus grave. La quatrième.
Pendant les 100 jours il est admis à la Garde de l’Empereur comme commandant intérim. Il est vrai qu’il a 44 ans, tous ses amis sont restés sur les champs de batailles. Commander des Grognards est un juste retour des choses. Puis de nouveau les batailles de Belgique.
Joseph a encore l’insigne honneur, si l’on peut dire, d’être parmi le carré creux, au milieu duquel l’Empereur est ramené et protégé pendant la retraite de Waterloo.
Mais Joseph l’indestructible est toujours là et bien là.
À 45 ans, rentré sur Paris, il va avoir un fils, allant ouvrir bien plus tard, une nouvelle carrière, donnant le départ de sa lignée militaire. Joseph, fort de sa Légion d’honneur et des avantages qu’elle procure, par le biais de ses institutions, va en profiter pour inscrire son fils aux écoles de la Légion d’honneur.
Lui qui a pu rapidement échelonner les grades militaires, pendant les 27 ans de carrière, faits dans les conditions que l’on a vu, n’est pas sûr que son fils pourra réussir aussi bien sans le soutient d’une bonne école militaire.
Jusqu’à ce que son fils entre à cette école où il est interne comme engagé, Joseph reste sur Paris.
Atteint du mal du pays, de ses montagnes, de ses vieux et rares amis, il décide d’aller prendre sa retraite à Murinais, dès la mort de sa mère, ayant déjà perdu son père depuis la campagne de Russie il s’installe dans la maison paternelle avec Marie, toujours séduite par la région, elle ne connaissait que les rues d’une ville, les places de Paris et ses proches alentours, alors que devant elle s’ouvre et se dressent la Chartreuse, le Vercors et les Alpes.
Retrouvant ses copains d’enfance, pour ceux étant encore là, tous les après midi, ou presque, il se rend à l’estaminet, servant une nouvelle boisson, le café.
Là, il joue aux cartes ou au jacquet. Il apprend aux présents, des nouveaux jeux de cartes qu’il a pu apprendre à la grande armée, par des engagés légionnaires recrutés sur toute l’Europe, et souvent bien plus loin.
Raconte avec assez de facilités les combats et les victoires de son régiment et de toute la grande armée. Parfois plusieurs heures où l’auditoire est rivé à ses lèvres et écoute cet homme, ayant vu plus de morts en une minute que ceux qui l’écoutent vont en voir en une vie.
Petit à petit il devient le héros du village, au grand soulagement du comte Timoléon d’Aberjon de Murinais, qui n’aurait pas accepté le voir mourir au combat, lui le maire et l’instigateur de cette carrière, en remplacement de son fils.
Parallèlement son neveu, Joseph-Hypolite va prendre sa suite dans les épopées militaires.
Le 23 germinal de l’an 3 (12 avril 1795) naît à St.Marcellin un garçon prénommé Joseph-Hypolite, (en souvenir du précédant Joseph de Murinais), dont le père n’est autre que Louis fils. Le père, également Louis, est né en 1740, sa mère se nomme Rose Gilibert. (Archives de St.Marcellin).
Nous revenons à la branche des boulangers de St.Marcellin.
Ils habitent grande rue à St.Marcellin où ils exercent, après le père Louis, la profession de boulanger. Ce fils de boulanger dont le père et son fils sont des érudits, va choisir à la vue de son oncle l’indestructible Joseph, la carrière militaire.
Surdoué, ce fils va faire de brillantes études administratives, engagé au 4 ième régiment de la Garde de Napoléon, il est nommé lieutenant puis rapidement capitaine à 28 ans. En 1815, après les 100 jours il est nommé Lieutenant Général du Royaume pour le département de l’Isère, sur délégation des pouvoirs par Louis XVIII, ou, comme on le nommerait aujourd’hui, Préfet de l’Isère, il a alors seulement 21 ans.
En 1819 le 20 janvier il est nommé au corps Royal d’Etat Major.
Louis XVIII, maintenant au pouvoir pour de bon, envoie en Grèce un Ambassadeur militaire ayant pour mission d’essayer de calmer et d’imposer l’indépendance de la Grèce aux Ottomans. Joseph-Hypolite va le représenter comme ambassadeur.
Les discutions s’éternisant, échouent, la guerre entre les Ottomans et la coalition de la France, de la Russie et de l’Angleterre est inévitable.
Joseph-Hypolite maintenant sur place depuis presque dix ans, connaît toutes les personnes qu’il faut connaître et échange avec l’administration Grec des rapports favorisés exceptionnels.
Fort de cette expérience, il est nommé en 1827 capitaine d’Etat-major du général Petit rejoignant la Grèce avec le corps expéditionnaire Français. Il doit informer le général de ses connaissances aussi bien militaires que civiles, mais surtout des rapports qu’il a avec la famille Royale de Grèce, en faisant la jonction entre le général et la famille Royale.
Dès son arrivée, à ses tous débuts, il s’installe dans un logement en ville, pas très loin du palais Royal de Grèce.
Joseph-Hypolite est un très bel homme que l’uniforme avantage encore. Ses allers et venues sont vîtes repérées par une jeune fille venant tous les jours au palais pour y prendre son poste de secrétaire principale du service des affaires étrangères.
Rien ne peut éviter l’inévitable.
Un matin sur le bord de la rue, alors que l’ordonnance de Joseph Hipolyte lui tient son cheval, se trouve de passer au même moment une jeune fille. L’un voulant rendre la politesse à l’autre, il s’en suivit une hésitation puis : des « je vous en prie », l’un voulant laisser passer l’autre. Suivant les règles de la politesse Joseph-Hypolite s’efface, la jeune fille s’arrête ne sachant que faire.
En fait, ils finissent par parler un grand moment. L’heure a passé trop vite pour eux, mais rien à faire, il fallait aller à ses occupations. On se donna rendez-vous pour finir cette conversation, à dix huit heures, au salon de thé du « Temple des Dieux Grecs ».
La jeune fille est à l’heure, le beau militaire aussi. Le garçon de salle vient prendre la commande. Elle prend un thé à la menthe, lui un chocolat.
Le temps écoulé est suffisant pour se dire ce que l’on n’avait pas pu se dire le matin, y compris le prénom et le nom de la jeune fille : Cécilia Politis. Sa famille remontant très loin dans les responsabilités des services administratifs, a toujours été liée d’une façon ou d’une autre avec les affaires étrangères de Grèce.
Le courant a l’air de bien passer, elle parle parfaitement le français, lui parfaitement le grec.
Ce fut le début d’une liaison amoureuse comme il est rare d’en trouver dans des occasions que l’on peut dire faciles.
Son travail de secrétaire des Affaires Etrangère lui valut un jour une question particulière, d’avoir à trouver un diplomate voulant bien faire le relais entre le Roi et la Chambre. Elle pensa tout de suite à Joseph-Hypolite, chargé de mission par l’armée et les politiques Français.
La région est très agitée, les travaux de négociations de toutes sortes nombreux.
Joseph-Hypolite est vite mis en relation directe avec le Roi et son entourage. Les échanges devinrent courants, aussi bien privés, qu’officiels. Cécilia n’est pas pour rien dans ces relations, lui permettant de passer des journées complètes avec Joseph-Hypolite.
Il est dit dans les milieux non officiels, que tous les salons du Palais pourtant très nombreux ont eu à cacher leurs amours, durant plus de six ans.
Le malheur, car s’en est un, voulu que les négociations, entres les parties en présences échouent. La guerre contre les Ottomans entraîne la région dans un tourbillon de feux et de sang.
À la bataille de Navarin en Morée en 1828, Hypolite est grièvement blessé. Il perd une jambe emportée par un boulet de canon. Il doit sa survie à son grade certes, les brancardiers le récupérant en premier, mais surtout à sa forte constitution. Les consolations et les visites de Cécilia, y sont certainement aussi pour quelque chose. Il doit être rapatrié en 1831 sans pouvoir avoir recourt à une prothèse.
Cécilia est désespérée mais se rend compte aussi de son état.
Avant de quitter le pays il reçoit les Honneurs Militaires, en même temps qu’une reconnaissance visible de la famille Royale par la remise de la Croix d’or de l’Ordre Royal de Grèce. La plus haute distinction Grec, rattachée à une importante pension, ainsi que la Légion d’honneur accordée par la France. (Voir son dossier militaire).
Joseph-Hypolite ne s’en remit jamais. Il est impossible de savoir, si c’est par accident ou volontairement, qu’étant occupé à nettoyer son pistolet d’officier, il est découvert mort, une balle au travers de la poitrine.
Il disparaît sans laisser de postérité. Laissant derrière lui cette épopée Napoléonienne, Royale et Grec. Rappelons aussi, qu’il est le deuxième décoré de la Légion d’honneur en 1814, alors encore au service de Napoléon.
À St.Vérand, débute une nouvelle activité. Charles-Prosper Détroyat né en 1839, va se décider de changer la production des ateliers de peausserie de St.Vérand.
Depuis quelques années, la marine marchande, prend une extension remarquable et ses transports sont de plus en plus réguliers. Le moment est venu où sont débarqués sur nos ports, toutes sortes de marchandises et produits exotiques, dont le sirop de cannes à sucre venant des régions tropicales. Il est impossible de faire le sucre sur place faute, pour l’instant, d’avoir les moyens manufacturiers indispensables.
Charles-Prosper, va équiper une partie des ateliers, en ce qu’il nommera « La fabrique de sucre indigène » il déposera ce nom aux inscriptions industrielles de la préfecture de l’Isère. (Archives départementales de l’Isère, division industrielle).
En partant de tonneaux de jus de cannes, qu’il transforme en pains de sucre coniques, desquels on casse des éclats avec un petit instrument prévu à cet effet, il organise une production de sucre très importante. Nous ne sommes pas encore aux morceaux, ni au sucre très blanc, mais à ce que l’on appelle le sucre candit ou sucre roux.
Avec ce sucre, il augmente sa fortune en peu de temps, jusqu’à ce que ses ateliers deviennent trop petits, mais surtout, l’énergie fournie par la rivière ne peut permettre un développement ou un agrandissement. Il part sur Lyon et essaye de trouver un site lui fournissant la possibilité de faire ce qu’il ne peut plus à St.Vérand. Malheureusement les créneaux et les débouchés sont occupés par des producteurs, passés à la grande manufacture, avec le sucre de betteraves de la région nord de la France. La matière première est sur place, et a envahi le marché. Il doit abandonner après avoir cependant amassé, sa très grosse fortune.
Il ferme la sucrerie de St.Vérand, et par hasard des connaissances Lyonnaises, il va « rebondir » comme l’on dit, comme savent si bien le faire les Détroyat depuis toujours.
Cet homme devient disponible, avec toutes les expériences de gestions qu’il a traversées, avec des productions aussi différentes que peut l’être, le cuir comparé à l’alimentaire.
Comme on l’a vu, sa situation financière plus que satisfaisante, va le faire solliciter, à titre de fondateur et de donateur, à l’administration des hospices civils de l’Hôtel Dieu de Lyon. Il accepte et fait don d’une importante somme. (Archive de la Légion d’honneur, par la base Léonore).
Il va donc siéger au conseil d’administration.
À ce moment précis, se présente la création du poste de directeur de l’Hôtel Dieu de Lyon. Il se propose comme titulaire et est accepté par le conseil dont il fait parti.
Il reste au Conseil, prend la direction de l’Hôtel-Dieu, où il va demeurer de très nombreuses années.
Ultérieurement à une vie exemplaire menée à Lyon, il reçoit à ce titre, la Légion d’honneur le 28 juin 1894 la troisième des Détroyat, mais cette fois à titre civil.
Après des années de cette direction, il prend sa retraite à Lyon et décède juste avant la guerre de 1939 à 100 ans.
Il laisse une descendance d’hommes d’affaires et de juristes Lyonnais et Parisiens, dont descend, Le Cabinet Détroyat Associés à Paris.
Mais où sont nos des Troyat du Foity ou des « Quatre Chemins » ?
Au Foity les générations se sont suivies. Les hommes et les femmes ont bien sués pour maintenir cette propriété, qui, quoique morcelée par les successions reste encore une ferme plus que correcte autour de la maison mère.
Des nouveaux bâtiments, ont finis au cours des temps par être construits sans pourtant être comparables à l’origine de la ferme de Pierre 1. Nous pouvons voir encore aujourd’hui le reste des murs de pierres bâties au mortier de chaux, où étaient construits les bâtiments brûlés lors de l’incendie du 20 novembre 1400, démantelés par besoin d’économie pour resservir ailleurs, sans pouvoir effacer en totalité ce que devait représenter l’ensemble des bâtiments.
Au lieudit les Thomas, puis l’année suivante au lieudit Croix blanche, les jeunes mariés dont nous allons parler s’établiront définitivement au lieudit la Croix Blanche.
Beaucoup de luttes pour y parvenir que seul le temps a permis de réaliser.
C’est ainsi que nous arrivons à la suite de l’épopée Napoléonienne de Joseph, à ceux qui habitent les lieux, descendants directs de Joseph « l’indestructible », nés à Murinais.
Il s’agit d’un couple se prénommant, Jeanfrançois-Régis, nous sommes en 1832, Jeanfrançois Régis, fils de Louis et de Laurence née Guillermont, va épouser une fille Jolly avec un ou deux L, elle se prénomme Adélaïde, elle a 28 ans, vient de Chasselay, un village assez proche de Varacieux. La ferme Joli, comme elle est écrite sur la carte Myriam, est une des plus ancienne ferme du plateau de Varacieux, elle groupait autour d’elle une très importante surface de terres labourables et de prairies.
Jeanfrançois-Régis aura avec Laurence une famille de plusieurs enfants dont une fille Mélanie qui épousera Augustin Revol le 23 janvier 1861. Le premier mariage de cette ère qui à lieu au Foity reconstruit, dont le bâtiment d’habitation est presque remis à neuf. Soixante dix neuf ans plus tard, je rendais visite à son nouvel héritier, Henri Détroyat du Foity, ce même Henri cousin germain de mon père, en plus son meilleur ami, qui lui vendra ce que nous appellerons au Travers du Pin, le champ du Foity. J’ai toujours en ma possession l’acte de vente et les origines.
Je reviens sur cette période avec quelques précisions afin de recadrer le déroulement de la vie des Détroyat vivants après cette période du début du 19 ième siècle, Napoléon va le marquer de son histoire.
Mais revenons à St.Vérand, d’où part une nouvelle activité.
Joseph né en 1702 fait construire sa maison à St.Vérand, en épousant Jeanne Suiffon le 26 juin 1736. Il va faire entrer dans la famille l’idée de pouvoir mener deux activités à la fois. Il va conserver avec un fermier, la ferme se trouvant sur un terrain hérité, devant laquelle il a fait construire sa maison. Belle maison avec des fenêtres à meneaux très renaissance et un jardin rehaussé pour la vue, par des hauts murs, au fond du paysage la chaine des Préalpes.
La deuxième et principale activité, la suite du « Saut de l’aigue », avec les tanneries et sucrerie de Charles Prosper, l’affinage des peaux et les teintures. Les ateliers font le chiffre. Ils vont le faire encore pendant tout le temps où les Détroyat de Romans et de Grenoble vont se suffire de cette production.
Nous allons voir se développer une activité restée jusque là en deuxième main, comme il était devenu le besoin de ces familles dont les propriétés devenaient insuffisantes à faire vivre une grande famille.
Cette situation durera quatre générations :
Celle de Jean Detroyat, épousant le 24 février 1688 Dimanche Monier à St.Marcellin.
Celle de Joseph Detroyat, épousant le 01/09/1776 Jeanne Mignier à St.Marcellin.
Celle de François-Hyppolite Detroyat épousant le 10/07/1807 Marie Zoé Bouvier à St.Vérand.
Celle de Charles-Prosper Detroyat, épousant Cécile Lydie Prosper Gauthier à St.Marcellin.
Puis, de suite après les générations du Foity, avec un homme des plus remarquable Louis Détroyat et sa femme Laurence, née Guillermont. Nous y reviendrons un peu plus tard.
Les tanneries fonctionnent à plein rendement à partir de 1790. Napoléon oblige les cordonniers de fournir cinq paires tous les dix jours, pour l’armée. Elles doivent avoir les bouts carrés et sont exclusivement réservées aux soldats, étant les seuls à pouvoir les porter. Dans le cas contraire, l’amende est de 100 livres, avec confiscation de toute la production.
Les ateliers de Romans fonctionnent jour et nuit, le cuir se fait rare. Pour cette raison les Romanais, devront s’approvisionner ailleurs qu’à St.Vérand.
Dès la fin de la grande Armée, après les Cent Jours, le coup d’arrêt est brutal, mais les gains sont réalisés. Fort de cette fortune, les Détroyat vendent la manufacture de chaussures à Monsieur Mossan de Romans et son gendre Monsieur Jourdan, allant asseoir en plus des chaussures, la chapellerie à Romans.
Pendant ce temps il passe à sa famille de St.Vérand la tannerie, et reste sur Lyon, disponible de toutes occupations, ayant réglé la succession de leurs parents avec son frère Jules, né avec retard en 1854, s’étant marié depuis quelques années avec Joséphine Bernard née en 1865. (Archives de St.Vérand).
À cette période précise, se présente la création du poste de directeur de l’Hôtel Dieu de Lyon. Il se propose comme titulaire et est accepté par le conseil, comme je l’explique plus haut.
De là, sa famille se développe, fondant la branche Lyonnaise, dont la plus part de ceux portant encore ce nom, sont comme leur aïeul, dirigeants de bureaux de comptabilité ou de gestion de Bourse, certains vont s’installer à Paris, avec des cabinets boursiers importants, existants toujours de père en fils. Un de ces descendants prénommé Bruno a laissé son nom à la science de la Bourse de Paris et crée le cabinet d’analystes financiers Détroyat Associés. Les carrières sont en route.
L’on voit ici, la branche de Paris formée, en fait par trois origines. La première pendant le règne de Louis XI, la deuxième par Joseph l’indestructible, la troisième par l’élargissement de la Lyonnaise créée par Charles-Prosper. Toutes ces branches sont rattachées à l’origine des de troya du foity.
Profitons du cas pour revenir sur la branche de Varacieux et de Paris, les militaires et les professions libérales.
Nous avons laissé un retraité artilleur, prénommé Henri au titre de capitaine, venu de Lyon. Cette branche va continuer d’exister à Lyon, avec le frère d’Henri faisant perdurer les militaires. Mais ceux là, vont laisser l’artillerie pour la marine. Cette descendance, quittera Lyon pour les ports militaires Breton, Détroyat alors à Brest est nommé commandant d’un dragueur de mines en 1938, il va rallier le Général de Gaulle en Angleterre avec ce navire.
Son nom, commandant Détroyat va être le nom de baptême d’une corvette transférée aux Forces Navales Libres un peu plus tard.
Le 9 juillet 1943 le dragueur du commandant Détroyat fait partie de l’escorte du paquebot La Sale, torpillé par un sous-marin Allemand.
Bravant le danger, son asdic en panne, il rejoint sur zone à l’appel du La Sale, et va réussir un sauvetage, reconnu pour être le seul du genre.
Jouant à fond sur le code d’honneur de la marine, il sauve devant l’ennemi, sur son bâtiment de petite taille, 322 rescapés du La Sale. Son navire à la limite de la flottaison, toujours chargé de ses grenades qu’il ne peut tirer, mais dont l’ennemi pense qu’il ne veut pas s’en servir pendant ce sauvetage, rejoint l’Angleterre avec ses trois cent vingt deux rescapés et son équipage, tous sains et saufs.
En mémoire de ce fait d’armes, deux bâtiments vont porter le nom de Commandant Détroyat, une corvette citée plus haut et un aviso.
L’aviso Détroyat va avoir aussi sa propre histoire. Il est choisi par la marine, pour représenter, à la Parade Navale de commémoration, se déroulant devant les côtes d’Antibes à Fréjus, avec à ses côtés l’aviso Jean Moulin, la représentation des Forces Française Libres de la Résistance ; aussi bien du sol Français que du sol Anglais, mais aussi de la marine. J’eus le plaisir d’y assister.
Un nom là encore glorieusement porté.
De l’armée, des affaires, il faut revenir aux origines : la terre.
En 1790 venant du mariage de Maurice et de Cécile Lydie Prosper Gauthier, qu’il épouse en 1836, né un fils Louis-Cézar, (Avec un z), une fille Juliette, un autre fils Fernand. Tous issu des des troya du foity ou des Détroyat un peu plus tard, ont demandés la division des terres, pour avoir chacun leur ferme.
Voici la suite, de la presque fin du domaine des troya du foity, il va être dépecé en dix morceaux dont certains seront vendus. Les petits enfants du fils de Jacpy, ont fait aussi parti de la curée. Doz est déjà séparé depuis longtemps. C’est le tour du foity, puis du grand plan, puis la partie des terres suivant celles de Quinsivet, à leur tour vendues par les héritiers. C’est le découpage en fermes vivrières, dont les noyers permettent de survivre. Nous allons le voir, pas pour bien longtemps.
Jusqu’au jour où un violent orage de vent et de pluie, arrachera en les couchants 80 % des noyers existants. Fragilisés par un champignon banalement appelé le pus, attaquant les racines et le collet de l’arbre. Ce sera définitivement la fin de ces petites exploitations, dont la plus part vont faire autre chose. Beaucoup vont devenir artisans : maçons, charpentiers, menuisiers, tisseurs, les fils vont aller travailler en ville, en résumé la dilution totale dans la masse Dauphinoise.
Tous ou presque, gardent les bâtiments comme habitation, louent les terres aux quelques uns essayant de résister pour survivre. Les familles sentent que la surface est de nouveau le seul moyen de tenir en restant au métier de la terre. Elles vont se déchirer pour des terres ou des biens qu’ils doivent ou ne doivent pas avoir. Tout est prétextes à litiges, procès et conflits, ne laissant pas de côté les « Quatre chemins » dont il faut aussi conter le devenir.
Nous sommes dans la division mathématique que j’ai précédemment soulignée. Le surnombre.
La superbe maison des « Quatre chemins » n’échappe pas aux envies et va également disparaître dans la « bataille » mais d’une façon inattendue, comme si elle avait honte de ces situations.
Pendant l’année 1753 c’est le « bouleversement » peut-on dire.
Les Alpes sont proches, l’on sait bien aujourd’hui le risque sismique demeurant dans toute cette région. Un tremblement de terre assez soutenu, va régler pour ce qui est de la maison les chicaneries et les procès. Est-ce, sa situation sur le haut de cette pente, plus le sous-sol particulier du lieu, cette énorme source et ce très important puits perdu naturel devant correspondre avec des cavités profondes, on ne sait ; en tous cas, la secousse et l’énorme déluge de pluie qui dure plusieurs jours après, vont déclencher un gigantesque glissement de terrain, emportant avec lui toute la construction, bâtie sur cette dalle de molasse, se transformant en « traîneau » l’emmenant avec elle très en dessous dans les contrebas.
L’eau avant de se tarir et de reprendre ses chemins souterrains, va recouvrir ses ruines de terre et de cailloux de molasse dévalant depuis l’amont, à tel point qu’il n’en apparaît plus rien.
Le peu restant servira de carrière pour les quelques pierres de taille apparaissant en surface.
Une fin bien dramatique et navrante pour cette superbe demeure représentant tant de travail et de soins, assurant sa place pendant 399 ans.
Elle ne fera aucune victime, puisque inhabitée pendant les divisions des héritiers possibles et nous savons qu’ils étaient très nombreux. Il n’empêche que là le désastre fut irrévocable et définitif.
Puisque nous en parlons, que sont devenues les maisons de famille.
Pendant la même période et pour les mêmes raisons de succession, la maison achetée par Jean 1, au village de Chatte va cesser de faire partie des biens familiaux. La raison n’est pas clairement définie, mais la dernière famille habitant Chatte avec le nom de Détroyat va disparaître entre 1745 et 1810. Comment et pourquoi ? Nous pensons seulement que cette famille à du se trouver dans l’obligation de vendre pour réaliser un capital, qui va permettre de se remettre en selle en Touraine, où l’on va retrouver des Detroyat, issus de la branche de Bayonne, cousins de cette branche nouvellement créée, revenir en ces lieux, se situant entre les ports Bretons et Paris. Nous savons qu’un Robert Detroyat né à Tours en 1911, héros de la guerre de 39 /45 y fera un passage et recevra à titre posthume la Croix de la Libération.
Quant à la maison du « Gros châtaignier », bien placée à la vue des axes principaux, elle fut repérée par le triste baron des Adrets (François de Beaumont), qui dans sa folie destructrice, après s’en être servi de base, pendant ses exactions régionales, va la piller et l’anéantir, l’incendiant avant de continuer son terrible parcours en direction de la Provence en 1565. Il en reste aujourd’hui que les fondations de molasse grise et de galets de la Galaure, avec la ruine d’un pan de mur.
Je sais depuis peu, que des recherches de ses ruines ont été faites par un homme de Varacieux, qui m’a joint par mail. Depuis j’ai su que cette très ancienne ruine à fait l’objet d’un arasement par le propriétaire du lieu utilisant les déblais à servir de remblais à l’élargissement d’une cours. Triste et définitive fin pour cette très ancienne maison.
La maison de Joseph construite entre 1735 et 1736 à St.Vérand est toujours présente habitée par des descendants ne portant plus le nom de Détroyat.
La maison de Varacieux est toujours là aussi. Elle abrite une famille descendant des Détroyat, dont une femme Marie Zoé, dite la Zoé Détroyat a atteint un âge avancé. Elle était une des sœurs de mon grand-père.
Le mas du Travers du pin est toujours présent, vendu en 1973, ce mas loge maintenant la famille d’un professeur du lycée de St.Marcelin.
La maison de Luzieux est toujours habitée par des Détroyat ainsi que celle du Foity.
Les maisons et les anciens hangars des négociants de Varacieux sont toujours là, et viennent de subir une belle restauration.
Suivons maintenant le tronc commun, ma descendance directe, par Louis de St.Vérand, point de repère de ma branche, né en 1801, donc bien plus tard mais bien placé comme repère, car seul Louis important sur cette lignée.
Ce rameau important se sépare du tronc commun, au mariage de Gaspard Troyat du Foity né en 1604, à l’occasion de son mariage avec Françoise Peyron qui à lieu à Varacieux entre 1621 et début 1630, alors que Jean né en 1595 marié avec Marie Botut (fille de notaire), continue la branche mère avec huit enfants, sans surnom de précision, dont un Jacques du Foity, fils Des Troyat du Foity né en 1616, marié à Urbane Cournier, qui eux auront quatre enfants dont deux fils : Jean, né en 1650, et Jacques né en 1655, plus leur deux filles ; leur petit-fils Jacques Détroyat du Foity, dit Jacolin né en 1665, mariés à Marie Buchillon, auront six garçons et quatre filles, une importante famille, qui avec les huit enfants de Jean Des Troyat du Foity, né en 1635 marié à Urbane Cournier née vers 1630, fonderont les deux fratries de « séparation » entre les Des Troyat Foity et les Detroyat Peyron ou Perron ou Peron, en passant par Jean pour les Foity et son frère Claude né en 1669 marié à Crest avec Marie née 1659, pour les Perron. La branche Foity de Varacieux, fournit par leur descendance, les différentes branches, St.Marcellin, Bayonne, Paris, Lyon et Varacieux.
Les différentes découvertes des uns ou des autres, comme Yves, Muriel et Olivier et moi Gilbert ont pu mettre en ordre depuis peu ce passage aussi important, qu’énorme. Ces recherches permettent en 2013, d’ajouter et de préciser la vie des gents de cette famille au tout début de cette Saga. Les années 1400 à 1650 sont bousculées par des points essentiels comme les noms et les occupations. Nous trouvons ainsi l’existence d’un important rameau, se développant au lieu dit Essema ou Essemat découvert par Yves. Je vais avoir par hasard la possibilité de le confirmer par une cousine de mon âge qui cherchait ses cousins, pour cela elle me contacta, puis je lui proposais de me dire ce qu’elle savait ou détenait. Denise Détroyat de Tullins, fille de Jean-Louis Justin né le 11 mai 1888, fils de Jean-Marie André né le 2 juin 1862 à Varacieux, fils d’un autre Jean et de Ferrouillat Marie. Puis plus ancien un autre Jean Détroyat né vers 1740 marié à Jeanne Boiroux, père et mère d’un Détroyat François né le 26 juillet 1771 lignée des Detroyat Foity. La jonction est faite en ajoutant son mariage avec Marguerite Gay. Associant la famille Beyle de l’Albenc et Guillermond de Vinay. En plus de tous ces rattachements bien connus pour les noms, elle me fournissait quatorze actes authentiques, de tous âges et de toutes sortes, mariages, ventes, achats de terres, dont Essema, contrats de mariages, livret de famille et cessions. Grand merci à la sympathique Denise et sa fille Patricia.
Une mine qui va nous permettre d’avancer avec les origines sur cette voie et la rattacher avec certitude.
C’est ainsi qu’en mêlant tous ces renseignements, nous pouvons situer l’ancêtre le plus ancien connu à ce jour, se prénommant Barthélemy, né vers 1475, qui enfant d’une famille très aisée fit construire à ses frais, vers 1500 une chapelle de prière sur l’actuelle place de l’église de Murinais dont il était natif. Cette chapelle vouée à Sainte Claude demeura jusqu’au XIX ième siècle rasée à la construction de l’existante. Le corps de Barthélemy est enseveli dans l’église actuelle, dans une tombe vouée comme il l’avait fait vers 1500 à Ste. Claude, il eut deux fils connus pour aujourd’hui, Claude (De sa vénération), et Jean nés avant 1500. J’avais su par une religieuse de Murinais, historienne de la congrégation, ce, un jour de Toussaint, que cet homme se comportait comme un saint, entretenant son lieu de prière y venant prier chaque jour, il était propriétaire mais dû obtenir une autorisation de son Seigneur pour faire la construction de cette chapelle en bois et maçonneries.
L’entretient qui dura des siècles fut confié à ses héritiers successifs qui s’installèrent, à Grenoble, certainement en fondant la branche de Grenoble, comme gantier et commerçants de peaux fines. Les frais d’entretient cessèrent d’être versés, pendant la guerre de 39. Je ne sais pas pourquoi.
Louis 2, bourgeois de St.Vérand, a un fils prénommé Maurice, il va épouser Marie Agnès Brizard en 1788.
Ce Maurice, pour commencer sa vie après son mariage, va devenir marchand du domaine de Quinsivet à la suite de Joseph de Boissieux, descendant du de Boissieux, que Jacques 1, avait placé à ce poste après son frère Jean 1, depuis bien, bien longtemps. Maurice et Marie-Agnès ont un fils, Louis-Cézar en 1790, épousant Cécile Lydie Prosper Gauthier.
Louis-Cézar (avec un z), va avoir un fils qu’il prénomme Charles-Prosper en 1839, (Prosper comme le père de Cécile, dont elle a hérité le prénom en troisième position) qui lui, créateur de la fabrique de sucre de St.Vérand et directeur de l’Hôtel-Dieu de Lyon, fonde la branche Lyonnaise. Mais il ne faut pas oublier que Joseph né en 1690 a eu une grande famille de six enfants dont trois fils. Ce sont eux, dont la fortune n’est plus à faire, qui vont à leur tour, créer trois branches depuis le tronc commun. Celle dont j’ai déjà raconté l’histoire et deux dont on va parler.
Jean-Louis l’aîné est rappelé par les sirènes de la terre pour construire une ferme à Varacieux, il se marie avec Marie Guillot. Mais Jean-Louis et Marie vont avoir deux fils Maurice en 1765 et Jean en 1766.
Maurice épouse Agnès Brizard en 1788, pour avoir ensemble encore deux garçons : Louis en 1795 et Jean-Louis en 1798. Louis succède à son père Maurice à Varacieux. Antoine comme son frère Jean-Louis est attiré par la construction d’une nouvelle ferme, sur les terres originelles de Doz et du Foity. Il choisira le lieu appelé le « Travers du pin » construisant, ou plutôt agrandissant un mas, portant ce nom avant 1770, à la suite d’un petit hameau portant le nom du hameau du Pin.
À peu près à partir de cette époque, va commencer la déchirure de ces deux frères, l’un reprochant à l’autre de l’avoir spolié à la succession de leurs parents Joseph et Magdelaine. Antoine a sûrement raison car la ferme que son frère Jean-Louis a construit est plus belle peut-être que la sienne, encore que.
Mais ce sont surtout les fonds qu’Antoine ne voit jamais venir. Où est passée toute la fortune de Joseph leur père ? Des procès s’engagent avec le prétexte de détournement d’héritage. Mais rien ne peut être prouvé, aidé en cela par un notaire, ayant établi des actes irréguliers, les a fait signer à des personnes plus ou moins honnêtes, agissant en prête-nom.
Le seul gagnant, sera le notaire, pouvant garder le reste des fonds en dépôt, avec de faux justificatifs de dépenses. Les frères s’en aperçoivent, mais un peu tard, ils se sont fait en sommes posséder. Leurs contacts se renouent, mais restent un peu « ébréchés » tout de même.
Antoine vie maritalement avec une femme qu’il veut épouser. Nous sommes en 1779, neuf ans qu’il vit avec Jeanne Buisson, sœur de Marie, épouse de Joseph son frère, devenu « trafiquant », réalisant des travaux comme artisan en déplacement. Ce Joseph épouse Marie en 1780.
En 1779, l’année précédente, son frère a épousé Jeanne Buisson ; du même élan, il loge au mas son neveu Xavier, lui donnant la main aux travaux de la ferme. Xavier est attiré par Jeanne. Vivant sous le même toit, ils lient une relation amoureuse ensemble. La tante est encore belle, mais ce qui doit arriver arrive, elle se retrouve enceinte. Mais de qui ? De son mari ou de Xavier ? Là est la question ?
Jeanne n’est quand même plus toute jeune, son accouchement se passe mal, elle décédera d’une infection généralisée peu de temps après avoir eu ce fils Jean-Louis en 1798 à 48 ans. L’enfant va être élevé par l’oncle et le neveu, sans savoir qui est réellement le père. Les deux hommes ont l’intelligence de ne pas se poser la question, louent une bonne nourrice, pour prendre soin de l’enfant.
Mais voilà ; Xavier dont les fredaines sont nombreuses, va encore tourner la tête à la nourrice, à son tour enceinte. Elle met au monde une fille en même temps qu’elle est renvoyée chez elle. Cette fille est prénommée Marie-Céline, nous sommes le 5 juillet 1838.
Entre temps, Jean-Louis né en 1798 se marie en 1827, avec mademoiselle Thomas de Varacieux, ils ont un fils en 1829, qu’il prénomme François Xavier, et restera vieux garçon.
Son frère aîné Louis, va se marier avec Laurence Guillermont en 1796, descendant de Maurice et de Jean-Louis le premier, né en 1742, bâtisseur de la ferme de Varacieux, n’ayant pas connu la spoliation des dépôts. Il va avoir en 1835 un fils Jeanfrançois-Régis, qui épouse Adélaïde Jolly née à Chasselay en 1831 le 15 août. Nous sommes dans la descendance de Varacieux.
Jeanfrançois-Régis et Adélaïde auront 5 enfants dont deux filles, ont un deuxième fils Jérémie Eugène en 1865, ne se sentant pas trop l’âme d’un terrien, un peu par obligation, car des terres, rien n’est libre, son frère aîné Joseph Sylvain assurant la succession de la ferme de la Croix blanche, décide de renouer avec la carrière militaire, comme ses deux cousins Joseph de Murinais et /ou Paris, et de Joseph-Hypolite de St.Marcellin (la Grèce), dont les faits d’armes sont souvent relatés dans les familles.
Jérémie s’engage en 1883, munit d’une bonne instruction toujours voulue dans cette branche de la famille. On vient en 1880, de fixer la date du 14 juillet pour la fête nationale et sa commémoration par un jour férié. L’époque est très républicaine, les jeunes de France reconditionnés sous la liberté, l’égalité et la fraternité.
La famille très républicaine, nous l’avons vu, depuis avant la révolution ; ces idées sont toujours là. En 1830 c’est la conquête de l’Algérie par la prise d’Alger. Jusqu’en 1847 Abd el Kader dirige la résistance. En 1881, le massacre de la mission Paul Flatters, vers Ourgala au sud algérien, remet en cause la sécurité générale de l’Algérie ; en même temps le protectorat est étendu à la Tunisie. Il faut des hommes pour assurer cette sécurité et ce protectorat. Jérémie ayant suivi le peloton est nommé sous-officier et signe pour être envoyé comme sous-officier en Algérie.
En 1883 il embarque à Marseille, rejoint Alger au 1ier Régiment des chasseurs d’Afrique à la compagnie des chasseurs Spahis. Il va, suivant les besoins, se voir affecté un peu partout en Algérie pendant les 7 ans qu’il y reste, moins les quelques permissions où il vient en France, faisant la rencontre en 1889 de Marie-Louise Bonneton, lors d’une réunion familiale à Varacieux. Puis repart en Algérie. Alors qu’il effectue une patrouille sur la frontière Tunisienne et Libyenne, en partant depuis sa base de Wargla où d’Hassi Messaoud, (les deux noms s’emploient), un accrochage a lieu avec sa patrouille de trente hommes. Une bataille s’engage avec les rebelles, il est blessé par une balle lui traversant le poumon droit, ressortant sous l’omoplate.
Les premiers soins lui sont donnés par les infirmiers d’une ambulance accompagnant de loin le théâtre des opérations. Sans cette intervention, Jérémie n’eut sûrement pas survécu à cette hémorragie. Transporté à Messaoud puis Alger, il est rapatrié sur l’hôpital militaire de Lyon où il va y rester pendant plusieurs mois en traitements intensifs, puis en convalescence. Sa capacité à résister, assistée d’une bonne santé, vont lui permettre de prendre le dessus et de s’en remettre.
François Xavier, (sans Jean devant), est seul au Travers du pin ; simplement aidé d’un commis, logeant à la chambre du petit logement, ayant servi à Xavier, puis à la nourrice. Il a su par Jeanfrançois-Régis, le père de Jérémie, qu’il cherche à savoir où est passé la partie de l’héritage qu’il n’a jamais eu, pendant les sept ans où il était en Afrique du Nord. François-Xavier sait que son oncle a un peu profité avec Louis Auguste et Marie Zoé, de la fortune de Louis, grand père de Jérémie, et demande à Jérémie de venir le voir.
Jérémie se rend au mas du Travers du pin, trouve son cousin dans un état physique pas très reluisant ; c’est vrai qu’il a 67 ans, que ce n’est pas mal pour un homme ayant vécu seul à cette époque.
Il fait entrer Jérémie et s’arrange avec lui sur sa propre succession. :
Jérémie retourne chez ses parents, par le chemin creux servant de raccourci pour Varacieux., il est songeur et pense : Que dois-je faire ?
Rentré chez lui, il explique à son frère aîné, Joseph Sylvain, ce que vient de lui proposer son cousin François-Xavier. Son frère est plus qu’étonnés, mais pense qu’il a sûrement raison, qu’il n’a peut être pas d’autres solutions pour sa succession. Son frère Joseph-Sylvain lui conseille d’accepter.
Quatre jours plus tard Marie-Louise arrive à Varacieux, va avec Jérémie chez le cousin du mas du Travers du pin. Lui fait visiter toute la ferme, dont l’eau est à la source un peu en contre bas de la maison. La maison est belle, malgré ses 120 ans, munie de ses deux cadrans solaires, peints par des Italiens spécialisés pour ce genre de travail, il y a maintenant bien longtemps, de chaque côté de l’angle de la façade sud-est.
Une grande cuisine, avec une cheminée haute à crémaillère, une cuisinière à braises à quatre trous au devant de la fenêtre de la cour, vers la porte d’entrée. Un escalier fermé monte aux chambres du haut, au nombre de trois plus une alcôve. La plus grande au dessus de la pièce à vivre, deux plus petites au dessus de la laiterie et du bûcher. Elles ouvrent sous le hangar, au devant du fenil, tournant par dessus l’écurie des chevaux pour rejoindre le plus grand fenil, au dessus de l’écurie des vaches, pouvant en recevoir beaucoup plus que la surface des terres peut le permettre.
Après cette écurie, la sellerie, puis la cave. Au dessus par un escalier le rejoignant, le petit logement indépendant, formé d’une cuisine avec sa cheminée, plus deux pièces en contiguës. L’ensemble représente un beau bâtiment construit tout en pierres de molasse. Côté nord adossé au fenil, un autre hangar dans lequel sont remisés les matériels et les chars. Devant les stalles des chevaux, le hangar comporte un appentis, dans lequel est garé le tilbury permettant de se déplacer sans problème.
Les terres ne sont pas si grandes et il faut bien la location des prés, entre le champ du bois et le ruisseau, pour pouvoir récolter le foin suffisant pour l’hiver ; prés, faisant partie du domaine, avant le partage du cousin, ne faisant pas grand-chose sur ses terres préférant les louer. (Ferme dite du perron avec 2 r ou 1 r).
L’ensemble est bien suffisant pour vivre à l’aise sans être trop exigeants.
Marie-Louise semble satisfaite de sa visite, trouve l’ensemble à sa convenance, dit à Jérémie, qu’elle veut bien venir ici pour passer sa vie avec lui. L’amour est aveugle, ne dit-on pas.
Jérémie va faire le mauvais choix ; il s’en rendra compte plus tard. Quand, Marie-Louise, vient s’installer avec un superbe trousseau et une dot confortable qui aurait pu avec les pensions de Jérémie, leur ouvrir d’autres horizons.
Elle va avoir deux enfants au Travers du Pin après s’être mariée avec Jérémie en 1897.